Article de Solidaire sur les élections en Grèce

Publié le 4 Mai 2012

Grèce :: Élections le 6 mai prochain

Article paru dans Solidaire, hebdomadaire du Parti du Travail de Belgique.


La colère des Grecs va s’exprimer lors des élections législatives du 6 mai. Les derniers sondages indiquent une forte chute des deux grands partis qui ont voté les mesures d’austérité.

Depuis la chute de la dictature en 1974, la Grèce est gouvernée par deux grands partis : le PASOK (social-démocrate) et la Nouvelle démocratie (ND, mélange de conservateurs et chrétiens démocrates). Mais la crise a déferlé sur le pays et le gouvernement du PASOK a imposé dès 2010 des mesures d’austérité dictées par la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et FMI). Ainsi, les travailleurs grecs ont perdu plus de la moitié de leur salaire en trois ans. En janvier 2012, le chômage a atteint 21,8 %, et touche un jeune sur deux.

Plus impopulaire que jamais, le gouvernement du PASOK a démissionné en novembre 2011. Un gouvernement temporaire, présidé par le banquier Lucas Papademos, vice-président de la Banque centrale européenne, a alors été mis sur pied. Des ministres issus de la ND et du parti d’extrême droite LAOS sont entrés au gouvernement. C’était une première brèche dans le système d’alternance bipartite. Des élections anticipées ont alors été promises, mais sans cesse reportées.

Les grands partis en chute libre

Le PASOK avait obtenu 44 % aux élections en 2009, mais n’est aujourd’hui crédité que de 15 à 17 % des intentions de vote. Comme si l’austérité ne suffisait pas, le PASOK provoque la colère de la population à cause de l’implication d’Akis Tsochatzopoulos, ancien ministre de la Défense et l'un des fondateurs du PASOK, dans une affaire de corruption.

Le deuxième grand perdant, c’est la Nouvelle Démocratie. Les sondages lui attribuent 22 à 25 % des voix, contre 33 % obtenus en 2009.

Pour rester au pouvoir, le PASOK et la Nouvelle Démocratie devront poursuivre leur collaboration. C’est ce que souhaite Lucas Papademos : «  La Grèce est à mi-parcours d’un chemin difficile. Les derniers mois ont prouvé que, face aux grands problèmes et aux risques majeurs, nous pouvions coopérer et dépasser nos différences. » En cas de nécessité, ils pourront aussi s’associer à l’un ou l’autre nouveau parti. La Gauche Démocratique de Fotis Kouvelis, par exemple. Issu de la Gauche radicale, Kouvelis estime que la Grèce doit respecter ses engagements envers ses créanciers (regroupés dans un mémorandum). « Mais nous pouvons changer certains aspects du mémorandum », a-t-il déclaré.

25 milliards pour les banques

Pour tenter de récupérer des voix, le PASOK et la ND multiplient les effets d’annonce. Evangelos Venizelos, le nouveau président du PASOK, promet des mesures pour « limiter l’impact de la crise sur les membres vulnérables de la société grecque ». Il promet également de « convaincre l’Union européenne et le FMI de donner plus de temps à la Grèce pour rembourser ses emprunts ».

Du côté de la ND, on promet de réduire les taxes et de soutenir les PME. Mais, en attendant, le gouvernement, où siègent ces deux partis, vient de décider l’attribution de 25 milliards d’euros pour recapitaliser les banques grecques. Pour les travailleurs, le message est clair.

Beaucoup savent également que d’autres mesures d’austérité seront prises après les élections, comme une nouvelle baisse des salaires de 15 % et la privatisation de sociétés publiques.

Quelles forces à gauche du PASOK ?

À gauche du PASOK, il y a deux gros partis : le Parti communiste de Grèce (KKE) et Syriza (gauche radicale). Ils sont les deux principaux partis à avoir voté contre les mesures d’austérité, et ils tournent tous deux autour des 11 % d’intentions de vote.

Le KKE est très présent aux côtés des travailleurs. Aux côtés du PAME, le front militant des travailleurs, il a organisé de nombreuses manifestations et des grèves générales. Le KKE est toujours là pour soutenir les travailleurs en grève, notamment auprès des sidérurgistes d’Aspropyrgos ou des chantiers navals de Perama. Il a aussi organisé des actions de soutien aux personnes qui ne pouvaient plus payer leurs factures d’électricité, et ses militants sont très présents dans les comités de quartiers qui organisent quotidiennement la solidarité avec les personnes touchées par la crise. Le KKE plaide ainsi pour l’annulation de la dette dans le cadre d’une lutte pour un pouvoir populaire.

Ce travail de terrain et ces positions en faveur des travailleurs portent d’ailleurs leurs fruits parmi ces derniers : « Je pense que la plupart des travailleurs qui mènent la lutte dans les usines, sur les lieux de travail, avec le PAME, vont voter pour le KKE, car il est le seul parti à leurs côtés », déclare ainsi Giorgos Pontikos, responsable du PAME.

Syriza, une vraie alternative ?

L’autre force à gauche du PASOK est Syriza. À première vue, le discours radical, anti-libéral, antiraciste de son président Tsipras ressemble à celui des communistes. Mais les différences sont de taille. Syriza veut renégocier la dette de la Grèce dans le cadre de l’Union européenne. Il a voté pour plusieurs traités de l’Union européenne aux conséquences désastreuses pour les travailleurs et s’est prononcé en faveur d’une privatisation partielle des compagnies grecques d’électricité et de téléphone.

Syriza a proposé une alliance de gauche « anti-mémorandum » (anti-austérité donc) et attaque le KKE pour avoir refusé cette alliance. Or, pour comprendre ce refus, il faut rappeler ce qui s’est passé sur l’île d’Ikaria, en mer Egée. Surnommée l’île rouge, Ikaria avait des maires communistes depuis des décennies. Aux élections communales de 2000, Syriza s’est alliée avec le PASOK, la Nouvelle Démocratie et l’extrême droite du LAOS pour renverser le KKE.

Yannis, sidérurgiste à l’usine d’Aspropyrgos, en grève depuis bientôt 6 mois, rappelle un autre élément : « À Volos, dans l’autre usine sidérurgique du groupe, Syriza, par l’intermédiaire de son représentant syndical, a voté contre la grève et pour le plan d’austérité du patron. »

Du côté du KKE, on est conscient qu’il n’est pas toujours facile de voter pour les communistes. « Les gens qui n’ont pas tout perdu pensent que la situation s’améliorera dans un an ou deux, explique Eleni, militante du KKE. Voter pour les communistes, c’est être convaincu que le capitalisme n’apporte rien aux travailleurs, au peuple, qu’il faut un autre système, le pouvoir populaire. » 

Rédigé par PRCF 38

Publié dans #International

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