Brésil, menace fasciste : pourquoi ?
Publié le 27 Octobre 2018

par Antoine Manessis, secrétaire de la Commission Internationale du PRCF.
Un « manifeste international contre le fascisme au Brésil » a été publié par Folha de São Paulo, signé par Bernie Sanders, leader de la gauche aux États-Unis, le réalisateur Costa-Gravas, François Hollande et Dominique de Villepin, l’ancien président du Parlement européen l’Allemand Martin Schulz, Pablo Iglesias, leader de Podemos en Espagne ou Yanis Varoufakis (Grèce). « Entre démocratie et fascisme, il ne peut y avoir de neutralité ! », conclut le manifeste.
Le touchant œcuménisme de ce « Manifeste » peut enchanter certains. Ceux qui pensent que les faits politiques sont des phénomènes issues de la génération spontanée, qu'ils n'ont pas de causes. C'est-à- dire les naïfs ou les escrocs.
Le fascisme n'est pas un virus tombé de Mars.
Le fascisme a une origine et une nature de classe, « un ventre encore fécond ».
Quel est ce ventre ? Georges Dimitrov et l’Internationale communiste ont répondu à cette question en définissant le fascisme comme « la dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus impérialistes du capital financier ».
C'est bien le capitalisme en crise qui génère le fascisme.
Et celui-ci arrive après une période de transition entre démocratie bourgeoise et fascisme que nous appelons la fascisation.
En Allemagne, dans les années 1930, il y eut des gouvernements qui légiféraient à coup de décrets-lois, qui baissaient les salaires, qui faisaient payer la crise aux travailleurs et aux couches moyennes, qui limitaient les libertés démocratiques. Avant Mussolini en Italie il en allait de même.
Au Brésil hier la droite a balisé la route du fascisme en pratiquant un « coup d'État juridique » pour renverser la présidente élue, mettre en prison l'ancien président Lula (Parti des travailleurs - PT) et mener une violente politique anti-sociale ; et cela après les compromissions de la social-démocratie.
En Italie avant le gouvernement fascisant actuel, c'est le social-démocrate Renzi (Parti démocrate - PD) qui a mené une politique profondément anti-sociale et européïste. Comme le Parti communiste italien s'était transformé en parti social-démocrate (PD) il n'y avait plus rien à gauche ayant la masse critique permettant d'offrir une alternative progressiste. Ce furent donc la Ligue (fasciste) et le M5S (fascisant) qui occupèrent l'espace de contestation déserté par la « gauche » acquise au capitalisme. Contestation purement verbale et démagogique, mais qui a trompé bien des Italiens.
La fascisation est le produit d'une situation où le capital ne peut mener sa politique anti-sociale et anti-patriotique sans recourir de plus en plus à des méthodes autoritaires face au mécontentement populaire. Et cela aboutit soit à la constitution d'un vaste Front populaire et patriotique qui par la lutte obtient des avancés et en tous les cas le recul du capital (comme en 1936 en France), soit au fascisme, recours ultime du capital comme en Allemagne en 1933. Soit à la combinaison des deux comme au Chili en 1973, où le gouvernement d'Unité populaire est écrasé par un putsch militaire initié par la Maison Blanche et l'oligarchie chilienne.
En tous les cas retrouver dans cette pétition, aux côtés de vrais progressistes, ceux qui concrètement, par leur politique, contribuent ou ont contribué à la fascisation est tout de même culotté.
Le fascisme est une des formes de la domination du capitalisme et ne pas mettre en cause le capitalisme empêche au véritable anti-ascisme de faire son œuvre de salubrité démocratique.
Octobre 2018